Ouverture de la 3ème édition des rencontres des finances publiques de France urbaine

Lundi 1 juillet

Hôtel de Lassay
Seul le prononcé fait foi

Monsieur le Président de France Urbaine, cher Jean-Luc Moudenc,
Mesdames et messieurs les parlementaires, chers collègues,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames, messieurs, 

Je suis tout particulièrement heureux de vous accueillir ici, à la présidence de l’Assemblée nationale, pour cette troisième édition des Rencontres des finances publiques.

Ce n’est pas encore tout à fait une tradition, mais cela crée une habitude que j’espère utile et stimulante, pour les uns et les autres.

La période est pertinemment choisie. Nous n’avons pas encore commencé le marathon du projet de loi de finances ; et nous avons eu le printemps pour nous remettre de l’exercice précédent. Les parlementaires sont de nouveau prêts à entendre parler de finances publiques locales, sans trop de stress.

C’est d’ailleurs pourquoi, je suppose, la semaine dernière, a été lancée par quatre ministres – Gérarld Darmanin, Olivier Dussopt, Sébastien Lecornu et Jacqueline Gourault – la concertation sur la réforme de la fiscalité locale qui viendra conclure vos travaux.

Il y a quelques jours déjà, je recevais à l’hôtel de Lassay un certain nombre d’entre vous. Jean-Michel Thornary, de la Cour des comptes, et Jean-René Cazeneuve, le président de la Délégation aux Collectivités Territoriales et à la Décentralisation, étaient déjà à l’honneur. Christophe Jerretie, député de la Corrèze et donc futur président de la République, ainsi qu’Olivier Landel, délégué général de France Urbaine, étaient dans la salle. Il s’agissait de fêter le trentième anniversaire de votre colocataire de la rue Joubert, l’ADCF, l’Assemblée des Communautés de France.

France Urbaine n’a pas tout à fait trente ans puisque la fusion de l’Association des maires de grandes villes de France et de l’Association des communautés urbaines ne date que de la fin de l’année 2015.

Il est en revanche un anniversaire qui n’a pas été suffisamment repéré cette année, et dont j’aimerais vous parler.

Il y a un peu plus de soixante ans, dans une assez grande indifférence il faut bien le dire, était publiée l’ordonnance du 7 janvier 1959 : elle consistait surtout à moderniser les bases d’imposition des fameuses « quatre vieilles » de 1791, plutôt qu’à mettre en place un système intégralement nouveau de fiscalité directe locale.

La publication de ce grand texte fiscal devait d’ailleurs, à l’époque, passer curieusement inaperçue. L’absence de discussion parlementaire n’était pas étrangère à cette discrétion.

Mais l’ordonnance elle-même ne comportait aucun exposé des motifs, et dans la déclaration gouvernementale, ce nouveau texte était intégré à un ensemble de dispositions relatives à la simplification administrative et à la politique de décentralisation. Déjà…

Cette ordonnance, c’était en réalité la mise en place des principes et de l’architecture même du système fiscal local. Depuis, nous avons connu un processus de réforme permanent, en apparence, quasiment à chaque projet de loi de finances, et finalement peu de changements réels.

60 ans après :

Le système fiscal est devenu illisible pour nos concitoyens ! Une multiplicité de taxes locales, pour certaines partagées entre plusieurs niveaux de collectivités, font que certains observateurs parlent même d’un « mille-feuille » fiscal. Avec des effets pervers assez bien connus : la note augmente sans qu’on ne sache jamais quelle collectivité ou agence en est responsable.

Les ressources locales ne sont plus en cohérence avec les compétences confiées par la loi et ne permettent pas de répondre aux enjeux de pilotage financier et de financement des transitions.

Les exemples ne manquent pas et remplissent les rapports parlementaires. Je pense tout particulièrement au rapport produit par Alain Richard et Dominique Bur ou à celui proposé par la Délégation aux collectivités avec Charles de Courson et Jean-Paul Mattéi. Et il y a suffisamment de spécialistes dans la salle pour dresser une liste complète de propositions. Joël Giraud, notre rapporteur général du budget, dénombrait pas moins de 214 impôts et taxes – et je pense qu’il est probablement l’un des seuls à l’Assemblée à maîtriser cette invraisemblable accumulation.

Alors, oui, une réforme de la fiscalité locale était une absolue nécessité. Je crois même pouvoir dire que tous les gouvernements, depuis vingt ans, l’ont promise. Et il s’est toujours trouvé une mauvaise raison pour la repousser.

La majorité a décidé de revoir la fiscalité locale, après avoir contraint les plus grosses collectivités à stabiliser l’évolution de leurs dépenses de fonctionnement.

Je ne mésestime en rien les critiques et reproches qui ont été faits à cette approche.

Je n’ignore rien, d’ailleurs, des pertinentes propositions d’amendement qui ont été faites par France Urbaine et qui seront à examiner cette année, chers collègues…

La Cour des Comptes a rendu hier son rapport sur les finances publiques, rendu désormais en deux temps. Au printemps, là encore, l’on parle finances publiques locales. On y constate une nouvelle amélioration de la situation financière des collectivités, prises dans leur globalité, avec même un excédent de 2.3 milliards.

L’on pourra d’ailleurs noter que les collectivités arrivent plus facilement à pratiquer la vertu sous la contrainte que l’Etat qui la prône… La cigale ne manque jamais d’expliquer à la fourmi quoi faire, qui taiseuse et peu prêteuse est, elle, assez réactive pour cesser de chanter et économiser.

Je vous le dis, je préfère la stabilité de la DGF – avec une visibilité d’évolution des dépenses – aux baisses unilatérales de 12 milliards que nous avions connues dans la période précédente.

Je parlais du soixantième anniversaire de l’ordonnance de 1959, permettez-moi de revenir sur un rapport qui a quarante ans : rédigé en 1979 par le sénateur Jean-Pierre Fourcade, ancien ministre des Finances, il retraçait justement l’histoire de cette ordonnance.

Il rappelait les termes du débat : le maintien des « quatre vieilles » en les basant sur les valeurs locatives ou l’abrogation de ces quatre impôts révolutionnaires pour leur substituer une fraction de TVA destinée aux collectivités.

C’est finalement, soixante plus tard, le chemin qui est pris. Les régions depuis la dernière législature, les départements demain, dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale actuelle, vont perdre une large capacité à lever l’impôt, mais recevoir une recette dynamique. 

J’entends bien le procès en perte d’autonomie. Mais je ne crois pas que l’autonomie réside dans la capacité à faire très légèrement osciller un taux, sans aucune maîtrise de l’évolution des bases ! Et en restant suspendu, chaque année, aux lois de finances qui peuvent bouleverser de bien fragiles équilibres budgétaires… Je crois fortement à l’inscription de recettes pérennes, prévisibles et moins inégalitaires d’un territoire à l’autre.

Le Grand Débat a montré quelque chose de potentiellement déroutant après plus de trente-cinq années de décentralisation. Nos concitoyens ne reconnaissent que deux interlocuteurs : le maire et le président de la République. Au milieu, préfets et présidents, Epci, Agences et Syndicats sont méconnus, confondus et voués aux mêmes gémonies.

Nos concitoyens, aussi, ont le sentiment de trop payer d’impôt. Ce n’est qu’un sentiment certes, mais on ne peut pas tout à fait leur donner tort quand notre dépense publique représente encore près de 55 points de PIB. Et dans ce ras-le-bol fiscal, l’expression ayant fait florès cet hiver, un certain nombre de concitoyens regardent les strates du mille-feuille à la française, comme autant de feuilles d’impôts…

J’appelle d’ailleurs votre attention sur un aspect qui n’a pas encore été analysé. La fiscalité indirecte, je pense notamment à la TVA, n’est pas indolore, mais elle est assez peu visible. Désormais, les impôts sur le revenu sont prélevés à la source.

Pour nos concitoyens les plus modestes, qui n’ont pas de plus-values immobilières, ni de fiscalité à régler sur la vente de leurs actions,les seuls impôts visibles seront les impôts et taxes sur le foncier, sur l’assainissement, sur l’eau, sur les services publics locaux.

Je n’ai pas abordé la réforme annoncée par Gérald Darmanin, concernant la présence territoriale des centres des impôts et perceptions. Nous aurons l’occasion d’en débattre dans les mois à venir puisque cette nouvelle organisation ne devrait être effective qu’en 2022.

À l’heure de conclure, je veux surtout saluer le réalisme et le sérieux qui caractérisent France Urbaine. Ne regardons pas hier comme un paradis, nous savons bien que ce ne l’était pas. Et ne voyons pas demain comme un enfer, ce ne le sera pas.

Il nous faut collectivement réinventer notre système de fiscalité et de dépenses publiques locales, devenu illisible, incompréhensible et inégalitaire. Ce ne sera pas sans heurts, car cette matière est à manier comme la nitroglycérine. Mais nous pouvons être habiles.

Clemenceau l’a dit : « Ce que nous dénommons vérité n’est qu’une élimination d’erreurs. » Je sais qu’il n’y a probablement pas de vérité absolue, en matière de finances publiques. Mais il y a de nombreuses erreurs. Je vous laisse travailler cet après-midi pour nous proposer d’en éliminer quelques-unes.

Je vous remercie et vous souhaite de fructueux débats.

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