Remise des prix de thèse de l'Assemblée nationale en histoire et droit parlementaires

Lundi 28 janvier

Hôtel de Lassay
seul le prononcé fait foi

Monsieur le Vice-Président, cher Marc Le Fur,
Mesdames et messieurs les Députés,
Monsieur le Président du jury, cher Yves Jégo,
Messieurs les Secrétaires généraux,
Mesdames et messieurs les Professeurs,
Madame et monsieur les Lauréats,
Mesdames, messieurs,

C’est avec grand plaisir que je vous accueille aujourd’hui, puisqu’il me revient de remettre, officiellement et avec toute la solennité que nous inspirent ces lieux chargés d’histoire et de mémoire, les prix de thèse de l’Assemblée nationale, décernés au titre de l’année 2017.

Créé en 2003, le prix de thèse de l’Assemblée nationale est un hommage à celles et ceux qui, dans les Universités, dans les Instituts d’études politiques, dans les centres de recherche et les écoles doctorales, contribuent à la réflexion sur le Parlement. Par leurs travaux de fond, ils nous éclairent sur son rôle, ses procédures, son organisation et, naturellement, son lien avec le citoyen.

C’est là l’outil de coopération entre l’Assemblée nationale et le monde universitaire. Concrètement, le prix de thèse se traduit par une aide à la publication, versée à l’éditeur. Il convient, en effet, que les travaux de qualité soient imprimés, diffusés, connus. L’objectif est qu’ils constituent, dans leur discipline, autant de références qui encouragent les chercheurs à se consacrer aux études parlementaires.

Cette réflexion sur le Parlement est nécessaire, nous le voyons bien, jusque dans l’actualité la plus immédiate. Vous le savez, je souhaite faire évoluer l’Assemblée nationale pour qu’elle soit parfaitement adaptée à son temps. Les études que vous menez, dans la liberté de pensée et l’esprit critique qui sont la marque de l’Université française, nous seront de la plus grande utilité.

Au cours des années précédentes, les membres du jury de l’Assemblée nationale ont distingué, par un prix de thèse ou par un prix spécial, vingt-sept thèses, toutes de grande qualité. Certaines classiques, d’autres tout à fait novatrices dans leur approche historique et juridique. Pour bien des lauréats, ce prix a été le point de départ d’une brillante carrière universitaire.

Cette année, la cérémonie de remise des prix appelle deux remarques.

D’abord, c’est la quinzième du genre,preuve que le prix de thèse de l’Assemblée nationale s’est bien inscrit dans le paysage doctoral français.

Ensuite, la formule a été profondément rénovée en juin dernier par le Bureau de l’Assemblée nationale,avec la distinction de deux prix : l’un pour le droit parlementaire, l’autre pour l’histoire de l’institution. Chacun de ces prix est décerné par un jury distinct, composé de parlementaires et de dix professeurs d’université.

L’objectif est de renforcer les deux éléments essentiels à la réflexion de fond : approfondir notre analyse des mécanismes institutionnels actuels ; affiner notre connaissance du passé pour mieux éclairer le présent et répondre aux attentes des citoyens pour l’avenir.

Au total, la division des Archives a enregistré treize dossiers de candidature, dont deux pour concourir aux deux prix.

Dix thèses ont été examinées pour le prix en droit parlementaire ; cinq pour l’histoire parlementaire. Un dossier a été déclaré irrecevable, car la majeure partie de la thèse était rédigée en anglais. Parmi ces thèses, certaines étaient d’un grand intérêt et il a été difficile de les départager.

Les deux jurys ont décerné :

–     d’abord, le 21 juin, le prix en droit parlementaire àM. Ludovic de THY, pour sa thèse en droit public, sur L’écriture des lois constitutionnelles de 1875,dirigée par M. le Professeur Patrick CHARLOT et soutenue le 20 juin 2017 à l’Université de Bourgogne ;

–    ensuite, le 27 juin, le prix d’histoire de l’institution parlementaire a été décerné à Mme Agathe BERNIER-MONOD, pour sa thèse en études germaniques, sur Les anciens de Weimar à Bonn. Itinéraires de 34 doyens et doyennes de la seconde démocratie parlementaire allemande,dirigée par Mme la professeure Mme Hélène MIARD-DELACROIX et soutenue le 21 novembre 2017 à l’Université de Paris-Sorbonne.

Ludovic de THY, votre thèse sur L’écriture constitutionnelle des lois de 1875vient fort opportunément rappeler la manière dont la République s’est ancrée en France après un double traumatisme : celui de la défaite de Sedan le 2 septembre 1870, et celui de l’enchaînement de cycles institutionnels marqués par l’alternance violente entre monarchie, république intégrale et césarisme bonapartiste, le passage d’un régime à l’autre se faisant soit par la révolution, soit par le coup d’État.

Votre thèse montre comment les institutions de la IIIe République ont été le fruit d’un compromis pragmatique sur deux éléments : le refus des excès des régimes précédents et la prédominance d’un parlement nécessairement modéré et bicaméral.

Vous nous conduisez au cœur des procédures et des cheminements qui ont abouti, au sein de l’Assemblée nationale de 1871, à créer les conditions de l’âge d’or de la République parlementaire.

Dans ce XIXe siècle que nous avons parfois tendance à juger terne aujourd’hui, c’est saluer tout le lustre de la IIIe République commençante, ses valeurs et son œuvre législative, autrement dit montrer que notre pays a su ne rien perdre de son éclat dans une période difficile.

Vous identifiez très bien les éléments qui ont fini par structurer cette Assemblée, qui n’a eu de cesse de se défaire de Thiers une fois la question de la paix et de l’indemnité de guerre réglée. Ce travail nous est précieux.

Agathe Bernier-Monod,vous connaissez bien l’Allemagne pour y avoir passé – comme moi – une partie de vos années d’études.

Votre thèse se lit très agréablement. Elle a été distinguée en raison de ses qualités intrinsèques, mais aussi pour deux éléments qui intéressent au plus haut point les parlementaires que nous sommes.

En premier lieu, vous nous permettez de découvrir une facette méconnue du Bundestag, notre premier partenaire pour les relations interparlementaires.

Vous nous apprenez en effet que les deux premiers Bundestag n’ont pas été uniquement constitués de novices en politique, mais que trente-quatre élus de Weimar ont assuré un passage de témoin.

Même si, vous le montrez bien, leur influence est restée modeste, quelques figures appellent tout particulièrement notre attention.

C’est d’abord celle de l’ancien président du Reichstag, le social-démocrate Paul Löbe, qui a dû cesser ses fonctions dès juillet 1932 pour être remplacé – j’ai envie de dire : chassé – par Göring. Brièvement président du SPD en 1933, il a préparé son exil à Prague.

C’est encore celle de Kurt Schumacher, lui aussi social-démocrate, grande figure de l’après-guerre par son opposition virulente à Adenauer. Arrêté dès 1933, interné à Dachau, refondateur du SPD, refusant toute coopération avec les communistes : l’homme est connu pour ses qualités d’orateur, mais aussi pour ses excès verbaux. Le Bundestag l’a censuré lorsqu’il a qualifié Adenauer de « Chancelier des Alliés ».

Enfin, parmi ces élus, nous avons le plaisir de voir quatre femmes au centre de vos travaux :quatre femmes dont les parcours résument bien l’histoire de cette période.

Trois d’entre elles ont été d’emblée antinazies. Deux sociales-démocrates d’abord : Louise Schröder, à l’origine de la loi de 1927 sur la protection des mères, qui a ensuite été l’adjointe d’Ernst Reuter à la mairie de Berlin, et Marie Ansorge, proche de Paul Löbe, expulsée de Silésie par les autorités polonaises et qui reprend courageusement son parcours politique dans la Ruhr.

Antinazie, la chrétienne-démocrate Helene Weber le fut aussi, et elle deviendra la femme la plus influente de la CDU – avant Angela Merkel que j’ai eu l’occasion de saluer la semaine dernière à Aix-la-Chapelle.

La quatrième de ces figures politiques d’outre-Rhin, Elisabeth Lüders, l’une des premières femmes à étudier à l’Université de Berlin dans les années 1900, reflète toutes les ambiguïtés du milieu des patriciens allemands dont elle était issue.

Députée nationaliste, elle essaie de se rapprocher du régime après l’année 1933, mais la manœuvre tourne court et elle est même emprisonnée. Elle reprend sa carrière comme libérale et deviendra la doyenne du Bundestag.

En second lieu, et c’est le point qui nous a le plus intéressés en qualité de parlementaires, vous montrez comment ces élus de base ont pris part, chacun avec son histoire personnelle, à cette transition essentielle de l’histoire allemande qu’est la démocratisation de l’après-guerre, en alertant notamment sur l’importance des valeurs après la barbarie du nazisme. Votre travail permet ainsi de mieux comprendre l’histoire de l’Allemagne, encore mal connue en France, ou du moins de manière trop superficielle.

Pour terminer, je souhaite vous témoigner à tous deux, ainsi qu’aux universitaires qui vous ont dirigés dans vos travaux, qui vous ont lus et vous ont distingués, toute ma gratitude pour leur contribution au rayonnement de l’institution parlementaire, si décriée par certains dans ces temps difficiles, mais si indispensable à notre liberté.

Je vous remercie.

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